La pénurie d'eau

La pénurie d'eau

Mis à jour le 15/06/2025

Identifier les solutions et adaptations en cas de pénurie d’eau

Surexploitation des nappes, réchauffement climatique et usages agricoles intensifs fragilisent durablement l’approvisionnement et les écosystèmes, avec des conséquences directes sur l’économie et les activités dépendantes de l’eau. Face à la multiplication des sécheresses et à la raréfaction de l’eau douce, la pénurie d’eau menace 30 % des Européens et 20 % du territoire chaque année. Comment identifier et proposer des solutions d’adaptation à vos clients pour sécuriser la ressource ? Et comment accompagner territoires et entreprises dans la gestion de ce risque croissant ? On vous dit tout avec Clément Bujisho, hydrogéologue au Syndicat du Bassin de la Sarthe.

PAROLE
D'EXPERT

  •  Une pénurie [d’eau] est une inadéquation entre la ressource disponible, ce que le milieu est capable de fournir, et les besoins. 

    Clément BUJISHO Hydrogéologue au Syndicat du Bassin de la Sarthe

Alors que les épisodes de sécheresse se multiplient sous l'effet du changement climatique, les risques de pénuries d'eau potable se font sentir. Selon un rapport du WWF[1], chaque année, le stress hydrique affecte d’ores et déjà, en moyenne, 20 % du territoire européen et 30 % de sa population. La surexploitation des nappes phréatiques et la dégradation de la qualité des cours d'eau menacent durablement la sécurité de l'approvisionnement en eau. Décryptage des risques liés aux pénuries d’eau, ainsi que des adaptations et solutions à envisager.

Trop longtemps considérée comme inépuisable, l’eau douce se fait de plus en plus rare et les cas de pénurie d’eau deviennent omniprésents dans l’actualité. Une pénurie est une inadéquation entre la ressource disponible, ce que le milieu est capable de fournir, et les besoins, qu’ils soient humains, via les usages possibles de l'eau, mais aussi les besoins des milieux naturels qui sont aussi demandeurs en eau.

[1] https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2023-09/Water%20scarcity_report_v7.0.pdf

Cartographie des risques
liés à l’eau

Il existe trois types de risques liés à l’eau pour les entreprises :

  • Les risques physiques

    (dus à la quantité et à la qualité)

  • Les risques réglementaires

  • Les risques réputationnels

Les risques physiques

liés à la quantité

PÉNURIES D’EAU

Quand la demande en eau dépasse les ressources en eau douce disponibles.

Plusieurs facteurs possibles :

  • Naturels : sécheresse prolongée, faible pluviométrie, manque de sources
  • Activités humaines : surexploitation des ressources, pollution, gaspillage, manque d’infrastructures
  • Démographiques : croissance de la population, urbanisation rapide
  • Réchauffement climatique

Conséquences pour les entreprises : une perturbation ou interruption de la production et de la chaîne d'approvisionnement (et des dommages financiers).

INONDATIONS

Quand l’eau recouvre de façon rapide ou lente une zone habituellement hors d’eau.

Types d’inondations :

  • Crue torrentielle ou crue lente ;
  • Débordement de cours d’eau
  • Remontée de nappe phréatique
  • Ruissellement (lors de pluies intenses)
  • Submersion marine (lors de tempêtes, de raz-de-marée ou de tsunamis)

Conséquences pour les entreprises : la présence d’eau où elle n’est pas prévue ; dégâts sur les infrastructures et les biens, paralysie des activités.

RETRAIT-GONFLEMENT D’ARGILES

Se produit par l’alternance de périodes de sécheresse où les sols argileux perdent leur teneur en eau et de périodes de réhydratation où ils gonflent, provoquant des fissures à la surface du sol et parfois un affaissement du terrain.

Conséquences pour les entreprises : dommages sur les bâtiments et infrastructures (fissurations des fondations, déformations des structures et dégâts sur les réseaux enterrés de canalisation et câbles).

liés à la qualité

POLLUTION

Les eaux de surface (rivières, lacs, mers) ou souterraines (nappes phréatiques) peuvent être dégradées par la présence de substances ou de déchets d’origine naturelle ou humaine.

La pollution peut être :

  • Chimique (pesticides, médicaments, solvants, etc.)
  • Organique (rejet d’eaux usés, prolifération d’algues, etc.)
  • Microbiologique (contamination par des bactéries, virus ou parasites)
  • Thermique (réchauffement des eaux qui perturbe l’écosystème)
  • Déchets solides (plastique, gros déchets flottants, etc.)

Conséquences pour les entreprises : difficultés liées à l’approvisionnement, avec impact opérationnel et économique.

Les risques réglementaires

Les entreprises sont soumises à des cadres juridiques exigeants, d’une part pour préserver la ressource eau et réguler son usage, d’autre part pour réduire la vulnérabilité humaine et économique dans les territoires exposés aux risques naturels d’inondation.

  • Protection de l’environnement : les entreprises doivent réaliser des études d’impact et de dangers, puis mettre en place des plans de prévention des risques (en cas d’incendie ou d’inondation notamment).
    • Eaux usées : les entreprises doivent déclarer et avoir une autorisation pour rejeter leurs eaux usées et traiter leurs effluents. Elles sont responsables d’un point de vue environnemental et peuvent être sanctionnées si elles portent atteinte à l’état écologique, chimique ou quantitatif des eaux.
    • Prélèvements : des quotas et restrictions sont posés sur les volumes d’eau prélevables, en particulier dans les zones de stress hydrique. Les entreprises doivent obtenir des autorisations de prélèvement et payer des redevances. Elles risquent l’interruption de leur activité en cas de pénurie.
  • Aménagement des territoires : les entreprises implantées dans des zones exposées aux risques naturels d’inondation doivent se conformer aux prescriptions des Plans de Prévention des Risques Naturels Inondation (PPRNI) établis par les services de l’Etat.

Les risques réputationnels

Une gestion irresponsable des prélèvements d’eau, de la pollution ou des incidents environnementaux liés à l’eau peut rapidement ternir la réputation d’une entreprise et peut entraîner des boycotts, pertes de parts de marché, voire la remise en cause de sa « licence d’opérer ».

Pour prévenir ces risques, les entreprises doivent adopter des pratiques exemplaires, une transparence accrue et impliquer les parties prenantes dans une gestion durable de l’eau.

Causes et conséquences des pénuries

Cette raréfaction de la ressource a plusieurs explications. Clément Bujisho, hydrogéologue au Syndicat du Bassin de la Sarthe, en charge de la « Gestion quantitative de la ressource en Eau » et du Projet de Territoire pour la Gestion de l’Eau du bassin Sarthe aval, précise : la première raison est le réchauffement climatique, qui entraine une augmentation de la température de l'air à l'échelle mondiale et donc, une hausse des phénomènes évaporatoires. On passe d'une proportion d'eau liquide à laquelle on a accès, à une eau plutôt atmosphérique et à laquelle l’accès est beaucoup plus difficile. La deuxième raison, ce sont les prélèvements, donc les usages, qui sont trop importants par rapport à la ressource. Il y a une prise de conscience aujourd’hui sur le fait que trop de prélèvements ont été autorisés par rapport à ce que le milieu est capable de fournir. 

Dans les faits, l’agriculture est la première activité consommatrice d’eau avec 57 % du total[1], devant l’eau potable (26 %), le refroidissement des centrales électriques (12 %) et les usages industriels (5 %). La répartition varie en fonction des bassins géographiques. Ce phénomène de raréfaction a des conséquences multiples, à commencer sur les milieux naturels. Or ceux-ci rendent aux humains, directement ou indirectement, de grands services écosystémiques. Si les sols ne sont plus capables de stocker l'eau, les ressources souterraines sont impactées, puisque leur temps de recharge est lent, explique Clément Bujisho. Cet impact est également observé sur les ressources de surface, qui nous concernent directement. Lorsque le niveau d’eau baisse trop, la qualité de l’eau est impactée, les poissons meurent, les algues se développent, les prélèvements ne sont plus possibles, les activités dépendantes de l’eau sont contraintes… Tout le système se trouve perturbé. 

Autre conséquence : un impact économique qui peut être lourd pour les entreprises. Si celui-ci peut paraître évident pour l’agriculture, il l’est aussi pour l’industrie, du fait des problématiques de sécurisation de l’activité. Ainsi, faute d’accès suffisant à l’eau, certains territoires français touchés par la sécheresse ont vu des lignes de production fermées. Enfin, un autre impact loin d’être négligeable est celui sur la réglementation : qu’elle soit à l'échelle européenne, française ou territoriale, la tendance, avec l’aggravation des pénuries est vers toujours plus de contraintes, dans le but de protéger l’environnement.

Les risques pour les entreprises

Mais certaines entreprises sont plus directement concernées par les pénuries d’eau, comme l’explique Clément Bujisho : le monde agricole est en première ligne, ainsi que l’industrie agroalimentaire, très consommatrice d’eau. Mais il y a des cas aussi plus spécifiques, comme les activités qui consomment beaucoup d’eau, par exemple les stations de lavage automatique ou les entreprises de BTP qui nettoient et restaurent les façades et qui ne peuvent pas travailler en période de sécheresse.  Les principaux risques concernent ainsi l’alimentation en eau et sa sécurisation, mais aussi le développement de l’activité qui peut être bloqué faute d’une ressource disponible.

Une nécessaire adaptation

Devant ce phénomène de raréfaction de la ressource, qui ne devrait pas aller en s’améliorant, des ajustements sont nécessaires. Si les économies d’eau concernent tout le monde, particuliers et entreprises, Clément Bujisho précise une entreprise ou un groupe agricole doivent adopter des solutions appropriées à leur activité. Pour l’agriculture, les pratiques doivent être repensées profondément, avec la réinstauration des haies, des bocages, la rotation des cultures… De nouvelles technologies se développent aussi, comme les sondes capacitives, qui sont placées dans le sol et permettent de suivre son humidité, et donc de connaître ses besoins d’irrigation. Pour l’élevage, investir dans la structure et l’isolation thermique des bâtiments est une solution pour qu’il ne fasse pas trop chaud et que moins d’eau soit consommée. Dans l’industrie, il y a des solutions à trouver notamment dans les processus de refroidissement. 

Quelques bonnes pratiques à instaurer

Afin de se prémunir, en premier lieu, il s’agit d’être sensibilisé pour prendre conscience du risque et pouvoir s’adapter. Les zones inondables sont relativement aujourd’hui bien identifiées par les personnes concernées, les zones à risque de sécheresse beaucoup moins. Une information pourtant capitale pour la gestion de l’activité, avec notamment le risque de ne plus pouvoir prélever d’eau pendant les périodes estivales. Pour s’informer, le site VigieEau (https://vigieau.gouv.fr/) permet de suivre la situation et les arrêtés anti-sécheresse émis par les préfectures. Clément Bujisho explique : les usagers peuvent se rapprocher des chambres consulaires qui les représentent : chambre d’agriculture, de commerce et d’industrie, voire les DREAL (Directions régionales de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) et DDT. Ces structures ont des informations très précises et peuvent aider à trouver des solutions pour ces problématiques. Il existe aussi des financements de la part des régions, des agences de l'eau pour des projets liés à l’adaptation aux pénuries.  

L’enjeu de la gestion de l’eau et de la sécheresse se résume à une question : comment maintenir un équilibre entre développement économique et préservation de l'environnement ? , conclut ainsi Clément Bujisho. Trouver un juste milieu et des solutions pour finalement maintenir les services écosystémiques qui nous permettent d’exister.

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